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Rencontre avec Laurent Ladouari, auteur de "L'or des Malatesta"

04/05/2016 -

Il y a quelques jours, Laurent Ladouari était à la librairie Maupetit, sur la Canebière à Marseille, pour parler de son nouveau roman, le deuxième d'une série qui s'annonce longue, L'or des Malatesta. Né à Marseille, ce consultant, ingénieur haut de gamme, a créé pour ses romans un univers futuriste, entre Jules verne, steampunk, Alexandre Dumas et le film New York 1997 ; cet univers, c'est notre monde après un holocauste nucléaire qui a rendu impropre à la vie humaine la plus grande partie de la planète. Sans qu'il ne nous le précise ouvertement, l'histoire se déroule à Paris, entre l'île Saint-Louis et la ville de Saint-Denis essentiellement, et elle évoque également la conquête d'un Groenland devenu habitable du fait du réchauffement climatique. Ce Groenland, qu'il appelle Thulé, est exploré par une "mission Pythéas", clin d'oeil à travers les millénaires à l'explorateur marseillais qu'un autre auteur, François Herbaux, a récemment mis en scène dans son roman Les nuits blanches de Pythéas le Marseillais, dont nous avons récemment parlé dans ces colonnes. S'il est en apparence dédié à un public d'ados ou de jeunes adultes, L'or des Malatesta est pourtant aussi une critique assez franche de notre société, ou si ce n'est une critique, tout au moins une peinture qui met l'accent sur un certain nombre de dérives : la corruption des politiques, la non-considération du "peuple", la quasi-consanguinité de l'oligarchie financière et ses actions avides, la menace d'une dictature répressive. Entre autres. Tout cela avec une légèreté de ton et une approche qui se veut celle du récit et non de l'analyse, une sorte de souplesse narrative propre au roman d'aventure, aux feuilletonx du dix-neuvième siècle ou aux séries littéraires et télévisées d'heroic-fantasy. Bref, un roman plaisant et pas seulement premier degré, même si on peut le prendre à ce niveau-là de lecture si on le souhaite.
A l'occasion de son passage à Marseille, Words from Mars a rencontré Laurent Ladouari et il a évoqué pour nous quelques-unes de ses thématiques et dévoilé une part de ses intentions ainsi que de sa méthode...


Imaginaire
J'aime bien laisser le pas à l'imaginaire du lecteur. C'est la raison pour laquelle dans le premier (ndlr, Cosplay) j'avais voulu donner le matériau pour fabriquer un rêve. Là, il fallait davantage que j'explique les rêves. Un roman, il est là pour agir sur l'imaginaire. Cela me permet aussi d'utiliser et d'exhumer des éléments anciens, historiques, peu connus, comme "l'île des Nautes" (ndlr, beaucoup d'éléments physiques du livre sont tirés de l'histoire et de la géographie parisiennes).

Longueur
Ce roman, je voulais qu'il soit aussi court que le premier et je n'y arrivais pas. Mais, quand j'ai commencé à écrire, toutes les idées je les avais déjà depuis longtemps, et l'histoire a demandé de plus en plus de pages. C'est un monde constitué de plusieurs mondes, que je me racontais depuis longtemps.

Ecriture
Il faut se lancer des défis, c'est une saga qui va être longue, qui commence par une salve de trois romans (ndlr, le 3e est en cours d'écriture, mais Laurent Ladouari a prévu d'en écrire beaucoup plus...) Je ne commence pas à écrire sans savoir comment cela va se terminer.
Je sais exactement où je vais, où je suis, mais la façon de composer sera clé pour donner le plaisir et le rythme. Mais je ne suis pas prisonnier de l'écriture, les personnages, c'est comme si je les connaissais, donc tout tombe facilement quand j'écris.
Cela dit, aujourd'hui, on lit par petites lampées, je voulais donc une métrique très précise... L'idée, c'est qu'entre deux stations de métro on puisse lire un chapitre, et qu'on y soit immédiatement
plongé.

Intention
Je souhaitais parler de la façon dont toutes les volontés s'entrechoquent dans notre société. Je voulais prolonger ces voix. En fait, tout ce qui peut inquiéter dans mon livre est déjà là, dans notre société. Il faut raconter à la jeunesse que demain sera déduit d'hier. Ce n'est pas un exercice de plaisir personnel, c'est écrit à destination des lecteurs, et non pas pour moi. Ma volonté, c'est de donner de l'énergie à de jeunes lecteurs. Et je suis heureux de rendre hommage à travers mon texte à Alexandre Dumas et à Jules Verne, parce que c'est du kérosène pour la jeunesse. En même temps, je parle au lecteur de 20 ans qui est en chacun de nous, au "Nonpareil" qui est en chacun d'entre nous (ndlr, une sorte de caste de personnages dans ses livres, qui évoquent une version "artistique" des ingénieurs X-Pont, comme Laurent Ladouari l'est lui-même), au diamant qui est caché. Cette personne en nous, c'est celle qui continue d'espérer pour le monde.

Héroïsme
Chaque roman est centré autour d'un héros différent. On a tourné le dos aux héros depuis un siècle, mais je ne crois pas que ce soit une tendance de fond de la littérature. Les héros surgissent en période de crise. On a mis nos héros en cage, mais je pense que les temps qui s'annoncent ont besoin de héros, la jeunesse d'aujourd'hui a besoin de héros (ndlr, il évoque au passage l'univers de Game of Thrones). Est-ce qu'un héros a besoin de nous ressembler pour nous plaire. Non, il a besoin de nous tirer, nous tracter. Je crois que toutes les situations peuvent être retournées.

Lectures
Je suis très classique. Ce que j'aime dans l'anticipation, c'est le prétexte. Prendre la réalité pour pousser la situation au plus loin.

Laurent Ladouari ne le formule pas, mais s'il a l'intention de devenir le George R.R. Martin français, il a pris le bon chemin. Son univers est plus technologique que celui de l'auteur de Game of Thrones, ses personnages sont - pour l'instant peut-être - moins "rock'n'roll", moins "noirs", mais il y a dans L'or des Malatesta une énergie incontestable et la promesse d'une saga passionnante et riche. Spring is coming, maybe.

The Melmac Cat

photo patrick coulomb

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